SARZEAU la Romaine

   Sarzeau la Romaine :

César a encore frappé en presqu'île de Rhuys ! On savait qu'il était venu en 56 avant Jésus-Christ pour observer, du haut de la butte qui porte son nom en Arzon, une bataille navale décisive contre les Vénètes... On savait que ses successeurs avaient fondé Darioritum (Vannes), qu'une voie romaine supposée allait jusqu'à Port-Navalo et que des «villæ» étaient apparues sur le littoral. Mais jusqu'ici le bourg de Sarzeau n'avait théoriquement rien de romain...

 Vieillir de mille ans en un jour !

C'est ce qui vient d'arriver au bourg de Sarzeau le lundi 16 juillet 2012 en un coup de pelleteuse dans l'îlot Poulmenach, à l'est de l'église de Sarzeau. Un sondage de routine devait durer 3 jours avant de lancer, à la rentrée, la construction d'un nouvel immeuble avec parking (dont les plans ont été finalisés en 2011). C'est alors qu'en cet après-midi ensoleillé, les deux archéologues distinguèrent diverses poteries à environ 1,50 mètres de profondeur. D'un seul coup d'œil ils reconnaissaient la céramique romaine... mais pas n'importe laquelle ! Elle avait été faite au 1er ou au 2e siècle, au Haut Empire, sous le règne des Auguste, Tibère, Néron, et autre Vespasien...

Le bourg de Sarzeau était donc romain peu de temps après la conquête de la Gaule par César, ce qu'aucun historien n'avait pu avancer jusqu'ici. A Arzon, on avait trouvé du romain au petit Mont, à Port-Navalo, au Crouesty et au Motteno. A Saint-Gildas des textes signalent un castrum à l'emplacement du bourg et un castellum est visible à l'est vers Keroman. Mais pour le bourg de Sarzeau on n'avait son signalement qu'à partir de 1060. C'est donc de 1000 ans qu'il venait de vieillir en une seule journée !

 Né dans les bois en l'an mil ?

Un historien et non des moindres, l'abbé Luco (1), se fît l'adepte, à la fin du XIXe siècle, d'une théorie selon laquelle le bourg de Sarzeau avait été créé de toute pièce sur une hauteur au milieu des bois vers l'an mil. La cause en était la montée des eaux qui avait isolé Ilur et fait disparaître Saint-Demetrius (Penvins). On sut peu après (2) que Saint- Demetrius n'était pas en Rhuys. La théorie ne tenait plus qu'à moitié. Mais comme il n'y avait aucun texte et que l'archéologie n'avait livré que quelques sarcophages à l'est et à l'ouest de l'église - qui pouvaient être du XIe siècle - la date de naissance du bourg ne reculait pas. On pouvait toutefois se poser une question. Pourquoi l'église de Sarzeau était-elle vouée à Saint-Saturnin, évêque de Toulouse martyrisé au IIIe siècle ?

On avança récemment l'hypothèse d'un Saturnin gallois qui faisait reculer la date de naissance du bourg avant l'an mil sans aller jusqu'au romain (3).

Cette fois, grâce à l'archéologie, c'est bien certain : le bourg est au moins romain. 

Du romain partout :

En fait, on sait depuis longtemps qu'il y a du romain partout en presqu'île de Rhuys et autant à Sarzeau qu'ailleurs.

On se souvient de la découverte fantastique du «trésor de Saint-Colombier» : 6427 pièces découvertes par des enfants dans une amphore lors des travaux de fondation d'une maison en 1976. C'était le 5e plus gros trésor découvert dans le département du Morbihan.

Douze ans plus tard, des promeneurs, chasseurs de débris romains (4), découvraient des sigillés, meules, poteries en terra nigra toutes authentifiées du Ier siècle par P. André, toujours à Saint-Colombier. Il s'agissait d'une gigantesque villa du Haut Empire qui n'a pas été fouillée car le site (en grande partie sur Saint-Armel) est une zone agricole et donc sous risque de détérioration. Ce n'est bien sûr pas le cas du centre-ville de Sarzeau.

                                                     Texte de Pierre Beunon, 20 août 2012

(1) Pouillé historique de l'ancien diocèse de Vannes

(2)  Laborderie, Histoire de Bretagne.

(3) R. Valléry, Églises et chapelles du Pays de Rhuys.

(4) P. et H. Beunon et L. Toquer (voir Ouest-France du 16/04/1988)

 


 


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